Palythoa mutukiZoanthidea : attention, danger !
Pour se protéger ou capturer leurs proies, de nombreux organismes marins produisent des toxines. C’est le cas des coraux mous des genres Palythoa, Protopalythoa et Zoanthus, bien connus des aquariophiles récifaux. Mais problème ! La toxine, plus précisément « palytoxine » secrétée peut également être dangereuse pour l’homme. Elle possède notamment une action vasoconstrictrice très puissante.

Palythoa mutuki 2Fort heureusement les cas d’intoxication restent rares mais pourraient progresser du fait de l’engouement croissant pour l’aquariophile récifale. Ils ont malgré tout fait l’objet de communications scientifiques.

C’est en 1961 à Hawaï que la palytoxine a été identifiée dans certains coraux mous du genre Palythoa, Propalythoa et Zoanthus. Elle était pourtant connue depuis longtemps par les habitants de l’île qui, autrefois, s’en servaient pour empoisonner les pointes de leurs flèches.
Il semble que certains poissons et crustacés comestibles en contiennent également.

L’intoxication se traduit par une symptomatologie variable suivant la voie d’inoculation :
• Fièvre, céphalées …
• Troubles cardio-respiratoires : accélération du rythme cardiaque, difficultés (voire détresse) respiratoires, toux … ;
• Troubles neuromusculaires : vertiges, tremblements voire convulsions, douleurs musculaires ; fatigue extrême, crampes, paresthésie (fourmillements …)
• Troubles digestifs : nausées, vomissements …
• Troubles visuels.
Si le traitement sera de toute façon symptomatique et permet généralement un retour à la normale en quelques heures, il convient, en cas d’apparition de ces signes, de signaler au médecin la possibilité d’intoxication par la palytoxine.

Pour éviter tout problème, il est nécessaire de prendre quelques précautions élémentaires, la première étant de s’assurer que le support des coraux est continuellement immergé même en cas de changement d’eau. Palythoa, Protopalythoa et Zoanthus sont en effet capables de libérer leurs toxines sous forme d’aérosols.

En cas de cession, de changement d’aquariums …, il conviendra de placer les animaux dans un sac plastique lui-même immergé. Le principe de précaution veut que le manipulateur soit lui-même équipé de lunettes, de gants et d’un masque de protection et qu’il effectue toute opération après avoir éloigné un public éventuel.
Le port de gants est d’ailleurs fortement conseillé pour toutes manipulations dans un aquarium, ne serait-ce que pour éviter la « maladie des aquariophiles » causée par Mycobacterium marinium.
Un lavage vigoureux des mains est de plus fortement conseillé après toute manipulation dans l’aquarium. Il faut absolument éviter de se frotter les yeux avant ce lavage.

La destruction d’une colonie (quel dommage !) devra se faire suivant le même principe de retrait puis le support placé dans un récipient contenant de l’eau de javel.
En aucun cas, les pierres ne devront être laissées à l’air libre pour être séchées ou brossées sous l’eau courante, voire ébouillantées ou passées au micro-ondes comme on a pu le voir conseillé sur internet.

Il semble que le genre Zoanthus soit nettement moins toxique que les genres Palythoa et Protopalythoa. Mais certaines espèces de ces deux genres se ressemblent énormément. Elles sont donc très souvent confondues et il faut être fin connaisseur pour les identifier avec certitude. Certaines études (voir ci-dessous le résumé) ont démontré que Palythoa heliodiscus est probablement l’espèce la plus dangereuse sur ce point.

Dans l’aquarium, le charbon actif peut servir à éliminer une certaine quantité de palytoxines mais il doit être changé souvent pour conserver ce pouvoir.

The Advertiser, quotidien local d’Adélaïde (Australie) publie, en mai 2017, sur son site internet (goo.gl/WQMX4j), un article concernant l’intoxication d’une famille d’aquariophiles (et de leur chien) par la palytoxine et la « décontamination » du logement qui s’en est suivie.



Zoanthus

Extrait de Plos One, revue scientifique, éditée quotidiennement par la Public Library of Science, diffusée exclusivement en ligne (https://www.plos.org/)
Traduction en bas de page

Palytoxin Found in Palythoa sp. Zoanthids (Anthozoa, Hexacorallia) Sold in the Home Aquarium Trade
Jonathan R. Deeds, Sara M. Handy, Kevin D. White, James D. Reimer
http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0018235

Abstract
Zoanthids (Anthozoa, Hexacorallia) are colonial anemones that contain one of the deadliest toxins ever discovered, palytoxin (LD50 in mice 300 ng/kg), but it is generally believed that highly toxic species are not sold in the home aquarium trade. We previously showed that an unintentionally introduced zoanthid in a home aquarium contained high concentrations of palytoxin and was likely responsible for a severe respiratory reaction when an individual attempted to eliminate the contaminant colonies using boiling water. To assess the availability and potential exposure of palytoxin to marine aquarium hobbyists, we analyzed zoanthid samples collected from local aquarium stores for palytoxin using liquid chromatography and high resolution mass spectrometry and attempted to identify the specimens through genetic analysis of 16S and cytochrome c oxidase 1 (COI) markers. We found four specimens of the same apparent species of zoanthid, that we described previously to be responsible for a severe respiratory reaction in a home aquarium, to be available in three aquarium stores in the Washington D.C. area. We found all of these specimens (n = 4) to be highly toxic with palytoxin or palytoxin-like compounds (range 0.5–3.5 mg crude toxin/g zoanthid). One of the most potent non-protein compounds ever discovered is present in dangerous quantities in a select species of zoanthid commonly sold in the home aquarium trade.


Résumé
Les zoanthidés (Anthozoa, Hexacorallia) sont des coraux coloniaux qui contiennent l'une des toxines les plus mortelles jamais découvertes, la palytoxine (DL50 chez les souris 300 ng / kg), mais on croit généralement que les espèces hautement toxiques ne sont pas vendues pour les aquariums domestiques. Nous avons précédemment montré qu'un zoanthidé introduit involontairement dans un aquarium domestique contenait de fortes concentrations de palytoxine et était probablement responsable d'une réaction respiratoire sévère lorsqu'un individu a tenté d'éliminer les colonies de contaminants, en utilisant de l'eau bouillante. Pour évaluer la disponibilité et l'exposition potentielle de la palytoxine aux aquariophiles marins, nous avons analysé, pour la palytoxine, des échantillons de zoanthidés prélevés dans des aquariums locaux en utilisant la chromatographie liquide et la spectrométrie de masse à haute résolution et tenté d'identifier les spécimens par analyse génétique de 16S et des marqueurs cytochrome c oxydase 1 (COI). Nous avons trouvé quatre spécimens de la même espèce apparente de zoanthidé, que nous avons décrite précédemment comme étant responsable d'une réaction respiratoire sévère dans un aquarium domestique, qui serait disponible dans trois magasins d'aquarium dans la région de Washington D.C. Nous avons trouvé que ces spécimens (n4) étaient hautement toxiques avec la palytoxine ou des composés apparentés à la palytoxine (0,5 à 3,5 mg de toxine brute / g de zoanthidé). L'un des composés non protéiques les plus puissants jamais découvert est présent en quantités dangereuses dans une espèce sélectionnée de zoanthidé couramment vendu dans le commerce d'aquarium à domicile.


 

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