Acropora clathrata Larry BaschLa guerre des coraux
Selon une étude de Mohsen Kayal et Mehdi Adjeroud, chercheurs de l’IRD, certaines espèces de scléractiniaires, les Acroporidae par exemple, pourraient être la (une) clef pour la résilience des récifs coralliens.


Les récifs coralliens sont concernés au premier plan par le déclin des écosystèmes dû au changement climatique mais également à l’activité humaine.

Deux chercheurs de l’Institut de recherche pour le développement (IRD), Mohsen Kayal et Mehdi Adjeroud se sont intéressés aux guerres territoriales que se livrent les coraux pour occuper l’espace.

En effet, la survie des coraux passe par leur faculté à « contrôler » l’espace sur un récif donné. Cette capacité d’adaptation est dictée par leur état sanitaire mais aussi par leurs préférences environnementales.

Cette « guerre des coraux » est bien connue des récifalistes qui constatent régulièrement la compétition que se livrent les coraux dans leurs bacs, tantôt évoluant, tantôt régressant, sans toujours en découvrir les raisons.

Cette guerre sans merci utilise différentes méthodes :

   * L’étouffement suite à envahissement du « territoire » par recouvrement d’un corail voisin ;
   * L’attaque directe par utilisation de substances nocives à partir d’organites venimeux (nématocystes) dont sont pourvus leurs tentacules.
   * La combinaison des deux méthodes ci-dessus.

Les observations des chercheurs se sont déroulées sur une vingtaine de sites récifaux du sud-ouest de la Nouvelle-Calédonie.

L’étude démontre que les modifications au niveau de la dominance des coraux peuvent être déclenchées par des altérations de l’environnement.

Les chercheurs ont constaté que certaines espèces de scléractiniaires, tels les Acroporidae, étaient en mesure de tolérer un climat plus chaud que celui de la Nouvelle-Calédonie en été mais souffrent de la dégradation croissante de leur environnement.

Les résultats suggèrent que l’amélioration des qualités environnementales pourraient permettre aux scléractiniaires de Nouvelle-Calédonie, et pourquoi pas de la Grande barrière australienne, de supporter un climat plus chaud.


Résumé de la publication

Au milieu des changements environnementaux mondiaux, prédire les réponses des espèces aux environnements futurs est un défi crucial pour préserver la biodiversité et les avantages humains associés. Nous avons exploré l'idée originale selon laquelle les performances compétitives des coraux, la capacité des coraux à préempter l'espace écologique sur le récif par le biais de la guerre territoriale, servent d'indicateurs des niches écologiques et des fenêtres environnementales des espèces, et donc de réponses aux environnements futurs. Nos études ont indiqué que les performances des coraux variaient en fonction de l'identité taxonomique, de la taille et de la position le long des gradients environnementaux, mettant en évidence des interactions complexes entre le cycle biologique, la stratégie de guerre et la ségrégation de niche. Nos résultats préviennent que les altérations croissantes des environnements côtiers peuvent déclencher des changements dans la dominance des coraux, avec le déclin des principaux taxons constructeurs de récifs comme les acroporidés, et soulignent l'importance de limiter les impacts humains pour la résilience côtière. Notre approche empirique démêle la complexité des interactions de type bataille des espèces et peut aider à identifier les gagnants et les perdants dans diverses communautés prises dans l'interaction entre les niches écologiques, les fenêtres environnementales et les changements globaux.


 

Publication à retrouver (en anglais) sur le site de Royal Society of London for the Improvement of Natural Knowledge.

 


Photo : Acropora Clathara (Larry Basch)