Des ampullaires signalés dans le Var
La présence d’ampullaires, a été détectée dans un plan d’eau du Var, près de Fréjus. Le premier signalement date de juillet 2018. À notre connaissance, l’espèce incriminée n’a pas été citée ; on parle simplement d’ampullaires (voire de « lampullaire » !).
S’agissant d’une retenue fermée, il n’y a pas de communication avec d’autres cours ou retenues d’eau. Selon la DRAAF PACA, il y a donc très peu de chance que cette espèce puisse étendre son aire de répartition locale. Mais, par précaution, les œufs (de couleur rose et très visibles sur les tiges de la végétation) ont été collectés tout au long de la période de reproduction.
Un arrêté préfectoral pris le 30 octobre autorise, pour le début du printemps 2020, la vidange du plan d’eau et son maintien à sec prolongé de façon à éradiquer les spécimens présents. Cette mesure peut paraître tardive mais elle était rendue nécessaire pour protéger les cistudes, tortues aquatiques présentes dans cette retenue.
Afin d’éviter la dissémination accidentelle de cette espèce, le maire de Fréjus a par ailleurs pris un arrêté interdisant l’accès du site.
Mais il semble que l’espèce incriminée n’ait pas été identifiée. En tout cas, son identification précise n’apparaît pas dans l’arrêté préfectoral.
Que cet escargot soit une espèce invasive, c’est indéniable ; qu’il représente un danger pour la biodiversité locale, c’est également vrai.
Rapportée par un quotidien, on peut lire, comble d’ineptie, la déclaration d’un membre de la Communauté d’Agglomération Var Estérel « Cet animal est très apprécié des aquariophiles, il est notamment utilisé pour nettoyer les aquariums parce qu’il mange la végétation. Il ne peut pas se reproduire dans les aquariums, mais il grossit. Et c’est dans ces cas-là que les aquariophiles s’en débarrassent parfois ».
Il fallait bien trouver un bouc émissaire, quitte à raconter n’importe quoi. Avant de tenir de tels propos, n'aurait-il pas fallu procéder à l'identification exacte de l'escargot ?
Si prompts à accuser mais si lents à reconnaître leurs erreurs, quand ils n’omettent pas tout simplement de le faire, les « gratte papiers » auraient pu se renseigner. Ils auraient alors appris que les ampullaires que l’on trouve dans les aquariums sont Pomacea bridgesii et Pomacea diffusa. Ces espèces n’attaquent pas les plantes. Il est évident que si c’était le cas elles auraient été, depuis longtemps, rejetées par les aquariophiles. Par contre, elles s’attaquent aux plantes mortes ou en mauvais état ainsi qu’aux algues notamment sur les glaces.
Pomacea diffusa a été décrite à l'origine comme une sous-espèce de Pomacea bridgesii. La systématique reconnaissait alors P. bridgesii bridgesii & P. bridgesii diffusa. Les analyses génétiques ont depuis confirmé qu’il s’agit bien de deux espèces distinctes
Si les ampullaires introduits dans ce plan d’eau varois sont P. bridgesii ou P. diffusa, alors oui, il y a possibilité d’introduction par un aquariophile (mais dans ce cas, mérite-t-il toujours être reconnu comme aquariophile ?).
S’il s’agit d’une autre espèce, alors que l’on recherche la véritable source d’introduction.
Mais en tout état de cause, que l’on évite de jeter, sans preuve, l’aquariophilie en pâture au lecteur lambda qui, néophyte, a plutôt tendance à croire ce qu’il lit.
Mais il est vrai que l’histoire des ampullaires dure depuis bien longtemps.
Retour sur cette saga …
En 2012, une décision d’exécution de la Commission européenne prend des mesures destinées à prévenir l'introduction et la propagation, dans l'Union, du genre Pomacea (Perry). Prétexte invoqué : une espèce, Pomacea insularum, porte préjudice aux rizicultures espagnoles.
Pourtant P. diffusa et P. bridgesii, très connues des aquariophiles, ne sont pas herbivores. Dans le cas contraire, il y a bien longtemps qu'elle auraient disparu de nos aquariums.
Cette décision découle d'un manque de discernement des "experts", incapables de différencier les différentes espèces.
Nous avions à l’époque attiré l’attention de la ministre de l’agriculture sur ce point.
Dans sa réponse, la Ministre maintient l'interdiction du genre Pomacea dans son intégralité mais ne demande pas la destruction des stocks et autorise sa détention chez les particuliers.
Surprenant (encore que ...) : plus de 6 ans après la publication de la décision européenne, le texte n’était toujours pas retranscrit dans la législation française ! C'est ce nous a confirmé en 2018 le "bureau des espèces exotiques envahissantes" du ministère de la transition écologique et solidaire, dont nous publions ci-dessous l'intégralité de la réponse :
"Apparemment la décision d'exécution de 2012 n'a pas fait l'objet d'une retranscription dans les textes nationaux ; parallèlement Pomacea ne fait pas partie des espèces réglementées au titre des EEE, il n'y a donc réglementairement aucune objection à une commercialisation, détention, transport, .... de l'espèce.
Néanmoins, nous travaillons sur des listes d'espèces prioritaires au niveau national, et dans le cadre d'une prochaine mise à jour des arrêtés de 2018 il conviendrait effectivement de faire figurer l'espèce...".
Fin 2019, les pomaceas ne figurent toujours pas sur la liste des espèces envahissantes !
Tout ceci nous permet de rappeler que rejeter des espèces exotiques dans la nature est une menace réelle pour la biodiversité.